Survie (5)

Il existe un exercice fascinant permettant de comprendre combien toutes les oeuvres nous appartiennent : il s'agit de les recréer, le plus littéralement possible. S'il est bien entendu difficile d'imaginer recréer un film avec exactitude, on peut en tout cas en fantasmer l'idée à l'aide de quelque technologie future ou d'une autre dimension ; on peut s'imaginer refaçonner chaque scène à l'image parfaite de ce qu'elle était initialement, et alors : hé ! ces scènes sont bel et bien celles que j'ai façonnées. J'ai le pouvoir absolu sur elles, et donc elles appartiennent à ce qu'en fait ce pouvoir, elles s'inscrivent dans la continuité que je leur décide. Bien entendu, dans l'ordre de nos capacités actuelles, l'exemple de la littérature est le plus probant : en effet, on peut très facilement réécrire un livre, l'écrire en fait, et faire l'expérience de son appartenance à nos mains, à notre vision. Il est bon de remarquer combien il peut être simple de prendre possession de n'importe quelle oeuvre par l'écriture, qu'il s'agisse d'un film, d'un jeu vidéo ou d'une série télévisée. 

A travers cette action réalisée ou projetée, on comprend combien l'oeuvre est nôtre, et combien on peut tout en faire, combien on peut découvrir de son histoire plus que ce qui en a été précédemment transmis. A tout moment de notre rédaction, on peut découvrir quelque chose dans les ellipses, ou l'on peut entendre de l'histoire des réalités différentes, d'ampleurs de variation variables, ou toutes formes de divergences épisodiques. On peut par conséquent accoucher d'une nouvelle forme de l'histoire, tout comme on peut accoucher de l'histoire telle qu'elle a initialement été portée, sans qu'aucune logique ne nous en dépossède ; l'histoire est écrite par nos mains, et même appelée, selon l'article précédent, à prendre la forme d'un objet dont elle sera - et donc est déjà - indissociable. L'objet triomphe et l'histoire est ce qu'elle est dans son contenu, telle que transmise à celui qui s'en empare.